Chronique à contre sens
dans la circulation à Saint-Malo
La circulation des personnes et des véhicules sur la voie publique tend à se complexifier ; la mise en jeu de la responsabilité individuelle et même collective devient essentielle ; la réglementation accompagne les changements apparemment nécessaires, pour aboutir, dit-elle, à une circulation plus douce.
Qu’en est-il vraiment ?
En présence d’une double voie cyclable, le croisement des véhicules nécessite de « mordre » les lignes …
Zone « Trente Km à l’heure »
En 1974, la vitesse en agglomération passe de 60 Km/h à 50 Km/h
En 1990, une démarche « ville plus sûre, quartiers sans accidents », aboutit à la création de la zone 30, définie dans l'article R110-2 du Code de la route par le décret du 29 novembre 1990. Il s’agit d’une section ou ensemble de sections de voies constituant une zone affectée à la circulation de tous les usagers. Dans cette zone, la vitesse des véhicules est limitée à 30 km/h. Les entrées et sorties de cette zone sont annoncées par une signalisation et l’ensemble de la zone est aménagé de façon cohérente avec la limitation de vitesse applicable.
Zone de rencontre
En 2008, on instaure un nouvel espace dit « zone de rencontre » où les voies sont partagées entre tous les usagers et où la vitesse est limitée à 20 km/h. On ne parle plus alors du « Code de la route » mais du « Code de la rue » !
Ici, on cherche à cohabiter au moyen d’une circulation non pas douce mais « apaisée » …
Les piétons peuvent circuler sur la chaussée et ont la priorité sur les véhicules, à l’exception du tramway ; tous les véhicules peuvent y circuler (voiture, vélo, bus...), mais ceux motorisés ne peuvent excéder une vitesse de 20 km/h.
Le décret n°2015-808 du 2 juillet 2015 apporte des dispositions importantes en faveur des cyclistes et des piétons, avec des conséquences pour tous dans les sens de circulation.
Le texte prend sa source dans les accords de Grenelle sur l’environnement puis dans la loi Grenelle 2 ; son article 5 insère après l’article R 412-28 du code de la route, les dispositions suivantes : « Art. R. 412-28-1.-Lorsque la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 30 km/ h, les chaussées sont à double sens pour les cyclistes sauf décision contraire de l'autorité investie du pouvoir de police. » Autres dispositions du texte : les conducteurs de cycles peuvent aussi circuler sur les aires piétonnes, sur les lieux de rencontres ; les sas au droit des feux de signalisation leur sont réservés exclusivement.
Ces mesures peuvent s’appliquer soit dans des espaces partagés, soit au moyen de bandes cyclables ; ces voies particulières réservées exclusivement aux deux roues non motorisées, mais elles sont rarement obligatoires et donc les cyclistes ne sont pas obligés de les emprunter ; par contre les véhicules quatre roues ne peuvent ni les chevaucher, ni y stationner, ni s’y arrêter pour déposer quelqu’un ou quelque chose ; les bandes cyclables sont également interdites aux piétons ; elles ne s’appliquent plus aux deux roues motorisées sauf décision contraire de l'autorité investie du pouvoir de police. ; un vélo électrique n’est pas motorisé, il est seulement dit « à pédalage assisté » . Alors, quid des vélos avec remorques ! Les remorques pour enfants avec deux places font environ 85/90 cm de largeur ; quid du stationnement des véhicules au-delà de ces voies nouvelles !
Les infractions réalisées sur les bandes cyclables sont qualifiées de très gênantes pour la circulation publique ; les amendes y sont donc majorées.
Les autres véhicules deux roues :
Admis dans un premier temps sur les pistes cyclables, les deux ou trois roues motorisées, de la moto au cyclomoteur, en seront en principe exclus.
Un utilisateur de rollers, skateboard ou trottinette (sans moteur) est considéré comme un piéton et doit rouler sur le trottoir. Les engins de déplacements électriques (trottinette électrique, hoverboard, gyropode, monoroue) doivent circuler sur la piste cyclable lorsqu'elle existe. Ces engins de déplacement personnel (EDP) motorisés ont interdiction de circuler sur le trottoir (sauf si le maire prend des dispositions afin de les y autoriser). Sur les trottoirs, l’engin doit être conduit à la main sans faire usage du moteur ; en agglomération, ils ont obligation de circuler sur les pistes et bandes cyclables lorsqu’il y en a ; à défaut, ils peuvent circuler sur les routes dont la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 50 km/h ; hors agglomération, leur circulation est interdite sur la chaussée, elle est strictement limitée aux voies vertes et aux pistes cyclables.
A Saint-Malo, ces appareils, avec ou sans moteur, sont fréquents sur la digue, alors même que seuls les vélos au pas sont autorisés ; par contre ils font mauvais ménage avec les pavés des autres parties de la ville …
Voies réservées ou usage partagé ?
L’usage partagé est traditionnel dans les voiries publiques.
L’usage réservé commença par les trottoirs en faveur des piétons ; puis apparurent les voies en faveur des transports en commun, en faveur des véhicules lents, du covoiturage … ; désormais on parle beaucoup des pistes cyclables …
Il existe également des places de stationnements réservées …
L’augmentation de ces espaces réservés ne correspond pas vraiment à l’esprit du bien commun public ; de plus, cela pourrait rapidement aboutir à un imbroglio juridique.
La tendance aujourd’hui serait de maintenir un usage partagé, d’accepter de se croiser courtoisement …
Et les quatre roues :
Les automobiles à quatre roues avaient depuis longtemps, il faut le reconnaitre, une place proéminente sur la voie publique ; les restrictions et limitations continuelles font naturellement « grincer des dents » avec la suppression assez régulière des zones de stationnement, doublée d’un accroissement des zones payantes, l’accroissement des contraintes de circulation provoquant un accroissement sensible des amendes.
Il est désormais interdit de se garer à moins de 5 m d’un passage piéton ; les collectivités ont jusqu’à 2026 pour matérialiser les interdictions.
En voile de fond, il y a la suppression des moteurs thermiques en 2030-2040.
A Saint-Malo, le revenu global des parkings payants (4 200 places | 13 parkings | 177 horodateurs), avec une part pour la Ville et une part pour la société EIFFA gestionnaire, n’est pas porté à la connaissance du public ; il doit être conséquent ; l’expérimentation des parkings excentrés avec une navette n’a pas été concluant semble-t-il ; certains parkings réservés pour les services publics pourraient être ouverts pendant les jours de congés ; le parking payant de la piscine du Naye n’est pas une réussite ; la chaussée des corsaires pourrait, tout du long et de chaque côté, comporter assez facilement des stationnements en épis, sans trop gêner la Chambre de Commerce, celle-ci pourrait par exemple déplacer ses gros blocs de granit immuables qui se trouvent à moins de 300m de la porte Saint-Vincent ; chez les particuliers, de nombreux garages servent de « fourre-tout », ce qui provoque deux places perdues, celle du conducteur qui n’a pas le temps ou le courage d’ouvrir son portail et celle du bateau malgré tout interdit au stationnement.
A Saint-Malo, reprenons une déclaration de Guillaume Perrin, adjoint au maire, faite dans le journal Le Pays Malouin du 8 mai 2021 :
« Nous ne ferons pas de réfection à l’identique car cela va évoluer, les attentes des Malouins aussi, avec la promotion des circulations douces. 2,3 millions d’euros seront consacrés à la pérennisation de l’expérimentation de la piste cyclable sur la chaussée du Sillon. 300 000 € sont prévus dans le cadre du plan vélo … »
Nous devons donc comprendre par là que sauf à devoir réaliser des travaux urgents, les voiries ne seront rénovées qu’avec une option cyclable sur les nouveaux tronçons ...
Ces propos nous paraissent un peu sévères à l’égard des automobilistes ; ce sont eux en quelque sorte, et eux seuls, qui contribuent par le biais des parkings payants à la rénovation des voiries .
La multiplication des panneaux
La mise en sens unique de certaine voirie avec une circulation à contre-sens des deux-roues provoque une augmentation sensible des panneaux de signalisations.
A Saint-Malo, l’expérimentation du boulevard Hébert en sens unique de circulation aura nécessité sur une longueur de voirie de 580 mètres pas moins de 23 nouveaux panneaux, d’ailleurs déjà posés à titre définitif, plus 5 panneaux mobiles provisoires, plus les panneaux annonciateurs de la zone 30 Km/h, plus le marquage au sol …
La circulation sur la digue de Saint-Malo
Au vu de la réglementation applicable, il ne nous parait pas souhaitable d’instaurer une bande cyclable sur la digue, celle-ci étant semble-t-il envisagée le long des propriétés privées, laissant les piétons sur l’autre bord non protégé de la digue et provoquant sans doute la suppression des bancs de repos ; restons-en à un espace partagé avec des vélos roulant au pas, c’est-à-dire moins de 6km/heure …
Attention rares sont les vélos qui respectent cette limite de vitesse ; les contraventions ici sont de 35 euros, mais les contrôles sont inexistants ; outre la vitesse parfois excessive, il y a de temps en temps des vélos qui avancent à plusieurs de front ; on voit aussi des vélos qui portent les planches à voile sur le porte-bagage par le travers, parfois également des deux roues motorisés !
Mais rien à dire tant que les piétons y trouvent leur place.
La digue de Saint-Malo-Paramé est la seule à notre connaissance qui ne soit pas protégée côté mer par une rambarde ou un parapet ; une telle protection pourrait aussi bien servir à double sens, empêcher les utilisateurs de la digue de tomber sur la plage (ce qui est bien heureusement rare … mais plus risqué en cas de création d’une piste cyclable) et aussi empêcher la mer à certains moments d’envahir la digue pour le plaisir certes, des photographes et des journalistes. …
Largeur de la digue : de 6 à 10 m
Et sur les remparts :
Autrefois, il parait que quelques malouins un peu casse-cou se faisaient fort d’en faire le tour à cheval.
Aujourd’hui, seuls les piétons à mobilité complète sont admis ; une observation : le sens unique adopté pendant le temps d’un confinement était celui des aiguilles des montres alors que nous sommes couramment habitués au sens inverse ! En quelque sorte, un tour à l’anglaise !
Dans les grandes agglomérations :
La ville de Paris vient d’adopter une généralisation du 30 km/heure sur l’ensemble de son territoire, aussitôt imitée par Lyon, Clermont-Ferrand et Bordeaux ; les milieux socialistes et écologistes paraissent des donner le mot et être ensemble favorables à cette mesure ; il est probable que cela se généralisera ainsi de villes en villes ; les cyclistes vont acquérir une liberté totale de circulation y compris dans les rues à sens unique ; par contre les automobilistes vont pouvoir être verbalisés assez facilement pour leur vitesse ...
Conclusion :
Les véhicules motorisés à quatre roues sont les plus pénalisés dans l’évolution récente concernant l’usage des voies publiques, par contre les cyclistes sont les plus vulnérables car non protégés dans les accidents, compte tenu parfois de la densité de circulation, parfois de la négligence de certains … Attention, aujourd’hui, la vigilance doit être d’autant plus grande que le nombre et les sortes de véhicules augmentent, que le nombre de voies réservées augmentent, également le nombre de panneaux routiers …
La réglementation applicable à tous, la relation humaine qui en découle, n’est malheureusement pas toujours douce, pour cette soi-disant « circulation douce » !
Signé : un vehiculo-cyclo-pédestro malouin
Article R 412-7 du Code de la route : « Lorsque, sur la chaussée, une voie de circulation réservée à certaines catégories de véhicules est matérialisée, les conducteurs d’autres catégories de véhicules ne doivent pas circuler sur cette voie (…) le fait, pour tout conducteur, de contrevenir aux dispositions du présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 4e classe ». Ce type de sanction n’entraîne pas de retrait de point sur le permis de conduire, mais elle donne lieu à une amende forfaitaire d’un montant de 135 euros.
Article R. 412-28-1.-Lorsque la vitesse maximale autorisée est inférieure ou égale à 30 km/ h, les chaussées sont à double sens pour les cyclistes sauf décision contraire de l'autorité investie du pouvoir de police.
Article L 2111-1 du Code général de la propriété des personnes publiques :
Le domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 est constitué des biens lui appartenant qui sont affectés à l'usage direct du public …
Article L 2111-14 du Code général de la propriété des personnes publiques :
Le domaine public routier comprend l'ensemble des biens appartenant à une personne publique mentionnée à l'article L. 1 et affectés aux besoins de la circulation terrestre, à l'exception des voies ferrées.