La réglementation des jardins

 

 

Un jardin est par définition un terrain fertile et ordinairement clos où sont cultivés des végétaux soit utiles soit d’agrément. Le terme est d’origine germanique, de la racine « gard » qui désignait un enclos, un espace réservé soustrait à la propriété collective. L’origine de l’art du jardin remonte à la nuit des temps, et pourtant la réglementation applicable est relativement récente, plutôt sporadique ; qu’en est-il vraiment ?

Le mot jardin est souvent associé à celui de parc, un terrain de plus vaste étendue, clos et planté d’arbres, généralement destiné à la promenade ; le mot provient du latin « parricus » ou enclos destiné au bétail ! Le parc prend son essor surtout lors de la vogue au XVIIIème siècle des jardins anglais, développée au XIXème dans les villes avec les parcs publics.

Le mot jardin est peu utilisé dans les différents codes législatifs [1]  ; on le retrouve seulement dans les expressions « cours et jardins » ou « jardin clos » ou « jardins familiaux » ; le mot paysage l’est beaucoup plus, en vue de sa protection, sa préservation, et donc le jardin qui est un élément important voire essentiel du paysage n’est pas à lui seul un véritable sujet de droit ; nous avons pu seulement retrouver les dispositions générales puis particulières suivantes :

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Des mesures générales de protection

Plusieurs législations applicables dans un cadre plus élargi – les paysages - peuvent être amenées à protéger des jardins ; la protection des paysages est importante et variée, régie par des dispositions émanant de plusieurs codes – urbanisme, environnement forestier, rural, patrimoine …

-        Les monuments historiques classés ou inscrits, placés sous le contrôle des DRAC – articles L.621-1 et suivants du CP ; il a été dit que cette législation n’était pas adaptée pour ce qui concerne les collections botaniques, les jardins de mémoire, les matériaux fragiles, sauf un inventaire précis

-        Les jardins aux abords de ces monuments sont également protégés – articles L.621-30 et suivants du CP ; une autorisation préfectorale sur avis de l’ABF est nécessaire pour les constructions ou démolitions mais aussi les déboisements, abattages d’arbres, transformations ou modifications de l’aspect des lieux …

-        Les monuments naturels et les sites, classés ou inscrits comprennent de nombreux jardins, placés sous le contrôle des DREAL – articles L.341-1 à 22 du CE et L.630-1 du CP

-        Des jardins sont également protégés dans les Plans Locaux d’Urbanisme ou PLU et dans les Aires de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine ou AVAP – articles L.642-1 à 10 du CP

-        Les réserves naturelles : l’article L.332-1 du CE permet d’y classer un jardin botanique ou arboretum constituant des réserves d’espèces végétales en voie de disparition, rares ou remarquables.

-       Le Conservatoire du Littoral de l’article L.322-1 du CE : cet établissement public de l’Etat a très tôt pris conscience de l’importance des jardins dans le paysage du littoral français ; il intervient souvent pour sauver un jardin mis en péril par exemple à la suite du décès de son créateur : voir le jardin Georges Delaselle de l’île de Batz, le jardin Serres de la Madone de Menton, le Domaine du Rayol à Rayol-Canadel-sur-mer ; au même titre, nous devons signaler les actions de la Fondation du Patrimoine en faveur des jardins - article L 143-2 du CP.

Des règlements particuliers

Le jardin est souvent traité comme une continuité de la maison, de sorte que les injonctions portant sur la construction peuvent s’étendre aux abords de celle-ci ; un permis de construire peut imposer un entourage végétalisé, selon des espèces issues de la région – article L.411-1 du CCH : aux dispositions relatives aux habitations peuvent s’adjoindre les jardins privatifs ou collectifs accolés ou non aux immeubles.

D’autres autorisations administratives, comme la création d’une entrée charretière, ou d’une clôture, peuvent imposer des règles de caractère public sur les jardins.

Des règles privées peuvent émaner des lotissements ; les jardins sont déterminés en fonction du parcellaire et aussi de l’implantation des constructions au milieu ou en bordure de chaque parcelle ; l’usage du jardin et puis l’entourage par des clôtures ou des haies sont édictés en vue d’une certaine harmonie ; certains titres de propriété peuvent aussi comprendre des servitudes de vue sur un fonds voisin, de sorte que la composition du jardin de ce dernier en dépend.

Les codes des usages locaux de chaque département parlent des jardins pour essentiellement les cas de locations de maraichers, avec les entrées dans les lieux et les sorties ; autrement, ils donnent parfois des tolérances sur les distances de plantations entre deux ou plusieurs jardins, afin de peut-être obtenir une continuité dans la végétation.

Les terrains lotis en vue de la création de jardins sont régis par les articles L.121-47 et 48 du CU ; les jardins familiaux appelés autrefois jardins ouvriers  par les articles L.216-1 du CU et L.561-1 et suivants du CR.

D’autres dispositions ponctuelles existent :

-        Article R.581-22 du CE relatif à la publicité interdite sur les murs de jardin public

-        Article R.583-2 du CE sur les nuisances lumineuses dans les parcs et jardins

-        Articles L.121-47, 48 et 49 du CU sur la préservation des parcs ou jardins publics dans la zone littorale.

-        Article R.422-64 du CE sur l’interdiction de chasser dans les jardins publics ou privés ; mais attention à l’article L.429-25 du CE : il n’y a pas de réparation pour les dommages causés par le gibier à des jardins non protégés.

-        Quelques dispositions existent sur l’usage des produits phytosanitaires dans les jardins, sur les déchets de jardins … Un décret émanant du ministère de la transition écologique et solidaire devrait à compter du 1er janvier prochain (2019) interdire la commercialisation en France des incinérateurs de jardin.

-        Les jardins attenants à des habitations sont dispensés des règles d’irrigation, aussi des servitudes publiques de passage de canalisations, article L.152-1 du CR -– ou du passage d’engins le long des cours d’eau, article L.215-18 CE - ou du droit de pêche au profit d’une association, article L.435-5 CE ; les jardins entièrement clos dispensés des servitudes de passage sur le littoral, article L.121-33 du CU.

-        Article L.342-1 du CF : les parcs et jardins clos de moins de 10ha sont exemptés de l’autorisation de défrichement de l’article L.341-3 du CF.

-        Au niveau fiscal, les jardins maraichers, floraux ou en pépinières sont exonérés partiellement – 20% - de taxes foncières – exclusion donc pour cette mesure des jardins d’agrément.

 

Le jardin a été de tout temps nécessaire à l’homme ; d’après Cicéron, « si vous possédez une bibliothèque et un jardin, vous avez tout ce qu’il vous faut » .

 

                                                                                                          Y.D.F.

 

 



[1]  CF ou Code Forestier, CP ou Code du Patrimoine, CR ou Code Rural, CE ou Code de l’environnement, CU ou Code de l’Urbanisme, CCH ou Code de la Construction et de l’Habitation