Les refus de défrichements forestiers
Constitue un défrichement « toute opération volontaire ayant pour effet de détruire l'état boisé d'un terrain et de mettre fin à sa destination forestière » ; cela vise également « toute opération volontaire entraînant indirectement et à terme les mêmes conséquences » – article L 341-1 du Code Forestier ou CF - .
Les défrichements sont réglementés par les articles L 341-1 à L 342-1 du CF ; ils sont soumis à une autorisation préalable de l’article L 341-3 du CF.
L’Administration peut être amenée dans le cadre de son contrôle à refuser des demandes de défrichement
Un refus peut être contesté devant la juridiction administrative ; il nous a paru intéressant d’examiner, dans la jurisprudence récente, les différents motifs de refus des défrichements :
Champ d’application : dans quels cas la demande de défrichement est-elle nécessaire ?
CAA Marseille 18 novembre 2010 : un terrain incendié conserve sa destination forestière
CAA Marseille 8 juillet 2010 : réaliser une piste en forêt pour extraction de carrière nécessite une autorisation de défrichement
CAA Versailles du 4 novembre 2011 : sur la notion d’espace boisé
TA Marseille 2018 : pour ce qui concerne le passage d’une ligne aérienne en forêt, l’emplacement des pylônes correspond à un défrichement, le passage des câbles correspond à un déboisement .
Autorisation de défrichement et demande de permis de construire ou de lotir : Les deux demandes sont en fait indépendantes – CAA Bordeaux 7 février 2013 : autorisation de défrichement préalable au permis – CAA Marseille 4 décembre 2014 : cas d’une autorisation de défrichement suivie d’un refus de permis de construire – CE 26 juillet 2018 : à propos d’un refus ultérieur de permis de lotir.
Autorisation de défrichement et autre autorisation : CAA Marseille 8 juillet 2010 : autorisation de carrière– CAA Marseille 4 octobre 2012 : création d’un golf -
Autorisation de défrichement et implantation d’éoliennes - CAA Marseille du 29 mai 2008 – CAA Nancy 9 février 2017 -
En présence d’un espace boisé classé ou EBC : Le classement en espace boisé classé est régi par l’article L.113-2 du code de l’urbanisme, créé par l’ordonnance n°2015-1174 du 23 septembre 2015 - Il interdit tout changement d'affectation ou tout mode d'occupation du sol de nature à compromettre la conservation, la protection ou la création des boisements. Nonobstant toutes dispositions contraires, il entraîne le rejet de plein droit de la demande d'autorisation de défrichement.
La question est malgré tout évoquée en cas de présence partielle d’un EBC - CAA Bordeaux 6 janvier 2011 : concerne la construction de 300 logements - CAA Douai 3 février 2011 -
En présence d’une zone naturelle d'intérêt écologique, faunistique et floristique ou ZNIEFF : CAA Douai 3 février 2011 – CAA Marseille 4 octobre 2012 : en ZNIEFF pour partie -
En présence d’une zone à risque très élevé de feu de forêt - CAA Marseille 19 mai 2011 : concerne un terrain situé dans le Gard -
La préservation des espèces animales ou végétales : pour assurer l’équilibre biologique d’un territoire - CAA Marseille 19 mai 2011 – CAA Marseille 4 octobre 2012 : espace boisé nécessaire à l’équilibre biologique d’un territoire présentant un intérêt remarquable du point de vue de la préservation des espèces animales ou végétales et de l’écosystème – CAA Nancy 9 février 2017 : préservation du Grand Tétras, espèce protégée dans les Vosges – CAA Marseille 4 juillet 2013 : intérêt remarquable en raison de la préservation des espèces animales et végétales (ici tortue d’Hermann, pinède de chêne liège, canche de Provence, orchidées …)
Les mesures compensatoires insuffisantes : en présence d’espèces animales ou végétales à protéger - CAA Marseille 4 juillet 2013 -
La défense des sols contre l’érosion : concerne essentiellement les terrains en pente - CAA Bordeaux du 13 mai 2008 – CAA Bordeaux 11 septembre 2017 : terrain en pente à la Martinique
Le maintien des composantes paysagères : CAA Marseille 19 mai 2011 – CAA Bordeaux 8 juin 2017 : l’abattage de beaux chênes affecte les qualités paysagères du site -
Quelques réflexions pour conclure :
- Pour ce sujet, la juridiction marseillaise parait être en première ligne, compte tenu de la pression urbanistique dans la région,
- La préservation des espèces animales ou végétales parait être l’argument majeur ; on ne parle nulle part de la préservation de la forêt par elle-même, sauf au travers de la préservation du paysage,
- Le sujet doit être apprécié également au regard des mesures compensatoires proposées.
YDF
Source : Legifrance